
Par Franco Onweb, Décembre 2024
C’était un samedi après-midi, l’oreille collée à mon poste de radio, j’écoutais l’émission d’Alain Maneval sur Europe 1. A la n des 70s, début des 80s, il était l’un des rares à passer du rock français indépendant et dira plus tard : « c’était l’époque du vinyle, je faisais ce que je voulais ». C’est là que j’entendis pour la première fois ce bout de texte : « La Tour Ei el, la Tour Montparnasse, la corde ou le gaz » et le nom du groupe : « Les Fils de Joie ». Quelques semaines plus tard, chez un copain qui faisait le DJ dans les boums, je vis ce nom sur une pochette en noir et blanc avec une tête de requin dessinée. Il y avait écrit « Adieu Paris » et son refrain entêtant allait me suivre longtemps.
1978
Les Fils de Joie se sont formés à Toulouse en septembre 1978, avec Olivier (chanteur, guitariste et songwriter né dans l’hémisphère sud), Alain (batteur franco-
suédois) et Chris (bassiste qui deviendra second guitariste, puis clavier). Encore lycéens, ils décident de s’appeler tous « de Joie » en hommage à leurs premiers modèles : Les Ramones (qui s’appelaient tous Ramone). C’est l’époque où le mouvement Punk déferle sur l’Europe. Ils sont encore peu nombreux en France et à Toulouse à se couper les cheveux mais l’histoire est en marche. La suite, ce sont les premières répétitions dans le garage familial, chez les parents d’Alain. Le trio fait ses gammes sur les reprises des Ramones - Leur adaptation ska de « Havana A air » deviendra un classique du groupe.
Et puis c’est le premier concert lors d’un festival à l’université Paul Sabatier de Toulouse. Programmé, en plein milieu d’après-midi, le trio bricole des reprises et quelques originaux devant un public clairsemé, amusé ou dubitatif. « Dans un groupe de rock, il faut au moins un bon chanteur et un super batteur, sinon tu ne vas pas loin » me con ait Olivier en 2020, avouant avoir pris le rôle de chanteur par défaut. « Heureusement que nous avions Alain à la batterie » rigolait-il. Après tout, à l’époque ce qui compte c’est plus l’énergie et la créativité que la technique. Le virus est pris, ils ne quitteront plus la scène.
1979
Olivier démontre déjà ses talents de songwriter et son humour avec ses premières compositions : « Un jour sans toi » (« C’est pire que les russes à Paris … »),
« Tonton Macoute » ou le déjanté « Harry », des titres enregistrés dès 1979 en même temps que la version ska du fameux « Havana A air ».Le groupe recrute Pascal Jouxtel au chant mais celui-ci nira par décliner l’invitation à poursuivre l’aventure a n de terminer ses études d’ingénieur (à Sup-Aéro). Il restera néanmoins toujours proche du groupe et co-écrira, avec Olivier, quelques-uns des textes marquants de cette époque dont « Adieu Paris », « Les plaisirs chers » ou « Le Requin vert ». De fait, Les Fils de Joie sont probablement le groupe de cette génération qui attache le plus d’importance aux textes, autant dans la forme que dans le fond. Ils ont été encore récemment qualifés par la presse de « post-punks rimbaldiens » avec leurs « chansons ciselées comme des poèmes » ou de « poésie punk
romantique » (Laurent Roustan, CENTRE PRESSE)
De fait, dès les premiers concerts, les fans adhèrent tels les membres d’une secte d’initiés qui possèdent leurs codes et partagent le même univers peuplé de héros désabusés, de situations souvent tragiques et d’humour noir. Ils reprennent en choeur : « Albert est un héritier de l’art corporel. Il ajoute une petite touche personnelle au modèle. Les filles de ma classe ont un peu perdu la face … » (Seul à Noël).
1981
Le tournant se produit en 1981. La gauche gagne les élections et dans la foulée libère les ondes autorisant la création des Radios Libres. Les Fils de Joie envoient
leurs cassettes partout en France et sont adoptés aux quatre coins du pays. Rejoints par Daniel leur nouveau bassiste et fan de musique black, ils ont développé leur style vers une New Wave élégante, teintée de ska ou de reggae. Après tout, de l’autre côté de la Manche, les Clash suivent le même parcours, rien d’anormal.
1982
Ils retournent en studio à l’automne 81 pour graver leur premier 45 Tours. Entièrement auto-produit par le groupe, il sort début 1982 et se vendra à deux mille exemplaires - un record pour des indépendants à l’époque - avec « Adieu Paris », en face A, que François Gorin quali era : « d’hymne souterrain d’une New Wave française encore mal dé nie » (Télérama). De fait, le titre est le re et d’une époque sans idéal et devient l’un des standards du rock français, le « No future » d’une génération hexagonale désabusée.
1983
Dès 1983, la radio toulousaine FMR eure le bon plan et place trois titres des Fils de Joie sur sa compilation « éphémère » aujourd’hui mythique : « Le Requin vert »,
« Les plaisirs chers » et une reprise live de « Green Onions » enregistrée à Marthon (Angoulême) lors d’un concert des Fils de Joie avec Indochine.Entre-temps Alain a quitté le groupe n 1982 après un concert au Grand-Parc de Bordeaux. Le batteur surdoué et cogneur retourne à ses chères études.
C’est l'arrivée de deux fans d’Angoulême qui va accélérer les choses : Dorian devient batteur et Jean-Marc Besson prend le rôle du manager. Ainsi organisés, les
Fils de Joie accélèrent sur les tournées à travers l’hexagone pour prêcher la bonne parole post-punk et New Wave.
Un soir dans le Finistère, à Riec-sur-Bélon, ils ashent sur le saxophoniste du groupe de première partie. Ni une, ni deux, ils l’embauchent aussitôt. Dès le
lendemain Marc « de Joie » est à Rennes lors du concert des Fils de Joie avec Marc Seberg.
Fin 1983, sous l’impulsion d’Alain Maneval, le groupe signe en n un contrat avec le Label Phonogram (le même que Serge Gainsbourg, liale de Polygram futur
Universal Music).
La suite sera moins joyeuse.
1984
Après une série de maquettes enregistrées au siège du label, les Fils de Joie entrent en studio pour l’enregistrement d’un Maxi 45t. Trois titres sont retenus :
« Tonton Macoute », « Havana a air » et « Voici le jour ».
C’est Jello, l’ancien guitariste de Starshooter qui est chargé de la production. Revenant d’Afrique, il donnera au groupe un son moins rock. Malgré son texte bien punk et second degré, « Tonton Macoute », devient un habitué des Radios FM. Le résultat est plutôt honnête mais Daniel le bassiste n’y résistera pas : déçu, il quitte le groupe en 1984 à la sortie du Maxi.
1985
C’est David Trou er, un autre charentais qui hérite de la basse pour ce qui sera la dernière tournée des faux frères de Toulouse.
Un album est en prévision et Olivier a déjà écrit de nombreux titres dont « J’appelle par-delà les mers », qui lui tient à coeur par son thème sur la di érence.Chez Phonogram on leur propose une idée : enregistrer « J’appelle par-delà les mers » et réenregistrer « Adieu Paris » et cette fois, ils vont mettre la dose ! C’est
Frank Darcel, ex guitariste de Marquis de Sade et producteur du premier album d’Etienne Daho qui est chargé de la production.
Frank m’a con é quelques temps avant sa disparition avoir « obéi aux cadres de la Major » mais le résultat est loin du style des Fils de Joie. La batterie est remplacée
par une boîte à rythmes, un bassiste de studio est embauché et toutes les guitares d’Olivier, ou presque, sont e acées au pro t des synthés (très en vogue à l’époque). Le mixage est con é à Dominique Blanc-Franquard et les Fils de Joie n’y sont pas conviés. Ils refusent que « J’appelle par-delà les mers » sortent en
l’état en face A. Le nouvel « Adieu Paris » déçoit les fans. Le groupe ne s’en remettra pas ! Dorian, Chris et David quittent le groupe.
1986
On est en 1986 et les Fils de Joie se résument aux seuls Olivier et Marc de Joie.
Après un été passé à surfer entre le Pays Basque et la Torche en Bretagne, les deux compères s’installent à Landévennec, dans la rade de Brest.
Ils y passent deux mois à composer et puis direction Paris, au studio de Radio Libération, pour enregistrer les nouveaux titres mais le cœur n’y est plus ! L’expérience Phonogram a laissé des traces et puis il faut travailler pour vivre. Bientôt ils passent plus de temps dans leur boulot respectif que dans le studio. Olivier 27 ans, l’âge de raison des rockers, il faut savoir grandir ! Les deux décident de jeter l’éponge, définitivement ?
Olivier mène alors une vie professionnelle et familiale à Paris mais il n’abandonne pas l’écriture. Le virus est toujours là. Il enregistre en solo sous le nom d’Olivier
Hébert ou en groupe (« La Collective », « Olivier Sit et Thieu » …)
1993-2008
Mais la légende des Fils de Joie a perduré. En 1993, le groupe toulousain Diabologum reprend « Adieu Paris », puis ce sont les compilations des « Jeunes Gens Modernes » qui font revivre le groupe : Avec « Adieu Paris » version auto-produite, sur le volume 1, « Les plaisirs chers » sur le volume 2.
2020
En Mars 2020, comme tout le monde, Olivier de Joie est coincé chez lui par l’épidémie de COVID. Une période d’arrêt qui lui permet de replonger dans la boite à souvenirs. Il a conservé les enregistrements de 1986 ou d’avant et des copains ou des fans du groupe lui ont envoyé des titres lives et autres maquettes digitalisées et conservées précieusement. Une idée folle germe en lui : faire revivreles Fils de Joie ! Il fait paraître durant l’été une compilation numérique en deux
volumes « Anthologie des idées noires » (1982-1986) et « Arrête-ça c’est trop bon » (1979-1981).
Depuis 2023
Finalement c’est le label Pop Sister, basé à Toulouse, la ville où tout a commencé, qui se propose de sortir l’album qui devait paraitre en 1986. L’objet s’appelle « Nous ne dansons plus la nuit » et paraît en 2023. C’est un mélange subtil des vieux titres des Fils de Joie, avec quelques enregistrements plus récents du groupe et même
un titre composé en 2018 par Olivier en hommage aux débuts « Ultime Pogo » ! Le disque démontre deux choses : que les Fils de Joie était un grand groupe et qu’Olivier est juste un immense compositeur.
Il n’en fallait pas plus pour que les Fils de Joie retrouvent la scène. Désormais en trio, comme aux débuts, avec Olivier de Joie, le chanteur, guitariste et songwriter
historique, Jean-Marc « Jomo » Leclercq, l’homme aux mille visages, à la basse (vieux compagnon de route du groupe et d’Olivier) et Guillaume Thiburs à la
batterie (et aux séquences claviers). Un webzine rock (Casbah Webzine) écrivait en 2023 : « Les Fils de Joie pourraient aisément prétendre au titre de plus grand
groupe culte et maudit de l'Hexagone ». Ils ont donné des concerts incandescents. Ils sont de retour et c’est juste une grande nouvelle !
Le double album live LES FILS DE JOIE EN PUBLIC est en écoute sur toutes les plateformes depuis le 24 décembre 2024 (Edition Vinyle à paraitre au 1er trimestre
2025). Le vrai son des Fils de Joie est sur cet album (22 titres : les classiques, les standards et des inédits). Les textes, l’énergie communicative du public et la force
mélodique des titres réjouiront les fans et rappellent à quel point les Fils de Joie ont tracé le sillon pour les générations futures depuis le début des années 80.Un projet de concert, festival, interview, ...
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"L'as des Astres" est disponible sur toutes les plateformes de streaming et de téléchargement.
Les fans peuvent également se procurer l'album en format CD et vinyle sur le merchandising lors des concerts.
Il est disponible aussi dans les labels de la co-production:
ZONE 11, KANAL HYSTERIK, KULTURE(S) PUNK, LE KEUPON VOYAGEUR, LA PROD DES ASTRES et CHEZ SIMONE
Un projet de concert, festival, interview, ...
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